1 août 2010

Voyage à l'ère du romantisme...

Hier, une amie m'a invitée au concert donné par Kadhem Essaher à l'Amphithéâtre Romain de Carthage...
J'y allai...
C'était pour moi une occasion pour me distraire, pour oublier ma mélancolie, et pour découvrir un chanteur dont j'ai tant entendu parler... 
Comme toute fille tunisienne qui se respecte, je connaissais quelques titres du "César", surtout ceux écrits par mon poète préféré, Nizar Qabbani...
Ma copine m'avait promise que la soirée serait inoubliable... jusqu'à 21h55, je ne la crus...
Je n'ai jamais été fan de ce chanteur...
Il me paraissait monotone, morne, et commercial...

22h... Il était là... Élancé, élégant, raffiné, classe... Il apparut vêtu en noir, salua son public féminin déchaîné, et commença son spectacle...
Durant trois heures, j'étais ensorcelée par les paroles magiques qu'il chantait... envoûtée par l'écho de sa voix mélodieuse, suave, et puissante à la fois... époustouflée par son accent irakien séduisant, irrésistible et craquant.. enchantée par les talents de ses musiciens, spécialement son violoniste ... éblouie par les lumières roses, bleues, mauves et vertes qui illuminaient la scène de Carthage...

J'étais émerveillée par ce paradoxe... Un homme à la  fois sensible, romantique, sincère, tout en étant mâle, viril... Des traits nobles, majestueux, hautains même, associés à un comportement gracieux, modeste, naturel et spontané... 
Une sobriété et une mesure sans semblables, mariée à une légèreté et à une vivacité incomparables...
Nul ne saurait chanter les merveilles du "Poète de la femme" à sa manière... sans hypocrisie... sans comédie... et sans tromperie...
Chaque personne présente à Carthage hier a pu palper la droiture des paroles interprétées par le Prince...

Cet assortiment extravagant, mais harmonieux, m'a fait redécouvrir pendant trois heures, l'ère du romantisme perdu, massacré par des slogans sexistes...
Pourquoi ai-je dit sexiste ?
Le sexisme englobe le machisme et féminisme ...
Le machisme, bien entendu, empêche les hommes d'éprouver des sentiments... Et même s'ils en éprouvent, il les empêche de les assumer, de les manifester, les extérioriser...(Et oui, et oui...)
Le féminisme à son tour, bloque la femme sur le plan amoureux... elle s'acharne sur l'homme (macho bien entendu), et veut devenir son égale... Et veut donc être "aussi forte" que lui...
Chacun des deux sexes cherche à fuir, à éluder les sentiments ! Mais pourquoi ?
Certains diraient que les attaches affectives manifestent la faiblesse de l'être humain... Mais comment?
Comment serait-ce possible, alors que j'ai vu un homme chantant devant des milliers de femmes, des paroles qui pourraient être jugées comme "infériorisantes" pour la plupart des mâles tunisiens, sans que cela n'affecte sa masculinité? 
Étant réaliste, j'ai toujours associé le romantisme à l'idéalisme, et je l'ai donc toujours rejeté... Mais hier, le "César" m'a fait dévoiler un romantisme autre que celui décrit par Imro2 El Kais, Jamil, Ibnu Zaydoun, ou encore Flaubert et Balzac... Un romantisme contemporain, au vocabulaire simple, ordinaire, intelligible et précis, traçant par excellence le portrait du couple arabo-musulman moderne... Profilant ses préoccupations, ses soucis, ses angoisses, ses problèmes, ainsi que ses perspectives, ses projets, ses ambitions, et ses espérances...
Il est indiscutable que certains d'entre vous, pensent, que ce Kadhem n'aurait rien apporté de nouveau, il aurait juste composé des mélodies adaptées aux paroles révolutionnaires de l'ingénieux Nizar...
J'étais de votre côté, jusqu'à ce que j'assistai à ce concert...
Kadhem est un nouveau Nizar, qui n'est nullement affolé par la force de l'amour... Curieusement, cette fragilité, au lieu de le révéler comme "faible" ou "mou" à mes yeux, l'a rendu encore plus vigoureux et plus viril...

En sortant, émue, je faisais son éloge... j'étais saturée d'optimisme... c'était la première fois que j'entendis un homme prononcer de telles paroles... Mais, en même temps, je me lamentai sur mon sort... je regardai ma copine, d'un air attristé: "Ya w5ayyti, mezél fama menhom erjél hédhom?" 

Pourquoi est-ce que, le jeune tunisien, au lieu de façonner son propre entendement du romantisme, le refoule, le chasse, et le nie ?

Où est le mal si l'on admet le fait qu'on est amoureux(se) d'une personne, et si l'on approuve l'idée de se sentir complètement métamorphosé(e) par cet amour ?

Quelle est la peine à se tenir la main, à s'offrir des roses, à s'exalter d'une pleine lune, à admirer un coucher de soleil, à contempler la mer agitée, ou simplement et seulement, à cajoler son/sa chéri(e) ?

De nos jours, on mesure même la tendresse de nos palabres... Malencontreusement...

Bien entendu, je ne blâme personne, et je suis très mal placée d'ailleurs pour le faire... Moi qui s'angoisse rien qu'à l'idée de s'attacher à quelqu'un... Oui oui, je refuse mes sentiments... Allergique à l'amour? peut-être ... ^^...

[Nul n'est parfait, dites-vous? ... 
Bein, moi si ! 
Et inutile de contredire mon orgueil !... 
Fokkni melle5er ...  ]

Un mot pour la fin: Nos vies seraient tellement plus faciles, plus débonnaires, et plus plaisantes si chacun de nous manifestait avec aisance ses émotions... si chacun de nous criait haut et fort, avec audace et bravoure, sa passion pour une personne...

Malheureusement, kima 9alou néss 9bal... Leklém m3a eli mé yefehmekch, yna9es fel 3mor...